SEXUALITÉ ET HANDICAP : JEAN-FRANÇOIS CHOSSY LÈVE LE TABOU

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L'ancien député UMP Jean-François Chossy a rendu son rapport sur les personnes handicapées, intitulé "passer de la prise en charge à la prise en compte". Une partie du document est consacré à la vie sexuelle et affective des handicapés.

 

Jean-François Chossy, vous avez remis au Premier ministre François Fillon et à Roselyne Bachelot-Narquin, la ministre de la Solidarité et de la Cohésion sociale, un rapport de plus de 120 pages portant sur l'évolution des mentalités à propos des personnes handicapées. Pouquoi avoir voulu faire la distinction entre "prise en charge" et "prise en compte"?
"La prise en charge est un terme administratif et médical. La personne handicapée, comme tout être humain, doit être prise en compte. "Prise en charge", cela implique une sorte de fardeau, de charge."

Dans ce document, vous évoquez tous les pans de la vie quotidienne des personnes handicapées, comme le logement, l'école ou le travail. Page 104, vous parlez de la vie sexuelle et affective des handicapés, et émettez l'idée qu'un jour des assistants sexuels voient le jour en France. Qu'est-ce que serait concrètement leur rôle?
"D'abord, laissez-moi vous dire que je suis désolé de voir que depuis quelques semaines on ne m'interroge que sur ce sujet-là, alors qu'il ne représente qu'une infime partie de mon rapport. C'est étonnant que la presse ne retienne que cela du bilan de ma rencontre avec 700 personnes au cours de cette mission. Concernant le rôle de l'aidant sexuel, j'explique que ce n'est qu'une solution envisageable pour les personnes qui n'ont pas accès à leur propre corps. L'assistance sexuelle est difficile à préciser. Il s'agirait de former des personnels, soignants ou non, à être un professionnel qualifié, et non bénévole, pour soulager les personnes handicapées. Cela n'aurait rien à voir avec une "passe", ce serait une démarche bien plus "sensuelle". Ce n'est pas un acte banal, et cela nécessite une formation technique et psychologique. L'important, ce n'est pas tant l'acte en lui-même, mais plutôt la mise en valeur et l'estime de soi."

La sexualité des handicapés apparaît comme une chappe de plomb dans la société, comme si elle n'existait pas..
"C'est une vraie hypocrisie. La sexualité dans les centres, c'est une réalité. Des personnes handicapées entre elles ont une sexualité, et il faut aider à leur rapprochement. On doit leur apprendre les gestes. L'intérêt de mon rapport c'est aussi que l'on parle enfin de ce sujet."

Comment font les personnes handicapées pour avoir une vie sexuelle actuellement?
"Souvent, elles n'en n'ont pas. Dans certains établissements, les directeurs font appel à ce qu'on appelle pudiquement des "parrains " ou des "marraines", mais qui sont en fait des prostitués qui viennent soulager les handicapés. C'est justement pour ça qu'il faut légiférer. Ce que je propose n'a rien à voir avec de la prostitution. Le danger serait d'assimiler l'assistance sexuelle à cela."

Vous écrivez,"le sujet est enveloppé de pudeur mais aussi enveloppé de douleur. Ceux et celles qui attendent des réponses sont dans l'impatience [...] le sort qui leur sera fait va dépendre des autres". C'est une réalité pour les personnes handicapées d'être dépendantes d'autrui, pour sa sexualité, comme pour tout le reste...
"Elles dépendent des autres pour tout. Le film Intouchables, que j'ai beaucoup apprécié, en est la démonstration, le personnage principal, en fauteuil roulant, dépend des autres pour toute sa vie quotidienne."

L'aide sexuelle existe déjà dans plusieurs pays européens comme l'Allemagne ou la Suisse depuis les années 1980. Pourquoi en France la question n'est-elle soulevée qu'aujourd'hui? "Parce qu'on a fait un raccourci depuis toujours avec la prostitution, qui est interdite. C'est comme si l'aidant sexuel était assimilé à un prostitué. On revient à l'idée évoquée précédement, il faut en finir avec cette hypocrisie et nous devons nous inspirer de ce qui se fait ailleurs."

Roselyne Bachelot-Narquin, au début de l'année 2011, s'était déclarée fermement opposée au principe de l'aide sexuelle...
"Je n'ai vocation à convaincre qui que ce soit. J'ai une mission d'information, simplement."

Enfin, vous avez laissé votre siège de député à votre suppléant, Paul Salen, en mai dernier, pour remplir cette mission de rapporteur auprès du Premier ministre. Qu'allez-vous faire maintenant?
"Ma mission est terminée, mais je vais faire en sorte de faire vivre ce rapport. En relançant mes anciens collègues parlementaires d'abord, parce que je pense qu'il y a dans ce document matière à trouver des propositions législatives. Ensuite, un rapport comme celui-ci ne peut vivre qu'à travers le monde associatif, qui est un aiguillon des pouvoirs publics. J'ai rencontré les plus grandes associations du monde du handicap, comme les plus petites."

Propos recueillis par S. B.

 

Source : zoomdici.fr

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